De passage à Zürich, j’ai retrouvé le Polybahn. Avec les roses trémières qui sortent des trottoirs (on se croirait à Saint-Martin de Ré !), les tramways bleus et blancs à voie métrique, les boutiques de luxe de la Bahnhofstrasse, les bateaux-limandes qui se faufilent sous les ponts surbaissés de la Limmat, le monument Pestalozzi et le célèbre émincé de veau à la Zürichoise, le Polybahn est assurément une des institutions de la ville.
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Ce funiculaire à voie métrique relie depuis le 1889 le Limmatquai à la terrasse de l’Eidgenössische Technische Hochschule (ETHZ), plus connue sous le nom de Polytechnicum ou Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich. Cette ligne connut une genèse tourmentée. Son promoteur, le Zürichbergbahn, envisageait à l’origine de desservir les hauteurs de Zürich. Suite à l’opposition de riverains et l’étude de plusieurs variantes côté Limmat pour une arrivée en tunnel ou en viaduc, le projet pris du retard. Entretemps, le prolongement du réseau de tramways vers le Zürichberg coupa l’herbe sous le pied au ZBB et la ligne se réduisit à un modeste tronçon de 176m de long pour 41m de dénivelée.
Initialement funiculaire à contrepoids à eau, le Polybahn fut converti à la traction électrique en 1897, non sans provoquer un tollé chez les sévères professeurs du Polytechnicum, qui craignaient des interférences entre l’installation électrique de la station supérieure et leurs délicates expériences. Déficitaire, menacé de fermeture dans les années 1960, le
Polybahnli faillit connaître le triste sort du funiculaire du signal de Sauvabelin à Lausanne. Fort heureusement, il fut acquis en 1976 par l’UBS (Union de Banques Suisses) qui finança en 1990 la rénovation complète de cette installation chargée d’histoire.
Rappelons que le Polybahn compta parmi ses passagers un certain Albert Einstein, élève au Polytechnicum de 1896 à 1900.
Attention : SPOILER ALERT (comme on dit à l’IMDB). Rappelons aussi pour les cinéphiles, que c’est à la station inférieure du funiculaire que Lino Ventura abat comme un chien Michel Piccoli dans
Espion lève-toi (Yves Boisset, 1982).
Dans ce film, tourné avant la rénovation des années 1990, on peut apercevoir les anciennes voitures qui comportaient sur la plateforme inférieure un frein de secours (sur la face avant, à gauche sous le capot).
Une des particularités du Polybahn est cette station inférieure, littéralement encastrée au premier étage d’un immeuble d’habitation :
Cette maison traversée par une ligne ferroviaire m’avait fasciné lorsque je l’avais emprunté pour la première fois il y a 33 ans. Disposition originale mais pas unique : le
Hochbahn de Berlin en possédait, et en possède encore, des exemples. (Plus sur ce sujet très prochainement).
Hochbahn, Berlin Bülowstrasse, circa 1910.
Photos (c) 2009 F. Delaitre et collection FD.